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Atterrissage en douceur, phase une en vue. A quand la seconde?

La visibilité sur l’horizon temps qui devrait laisser place à la phase de la reprise conjoncturelle est pour l’instant extrêmement faible.

Après quelques doutes (furtifs) qui avaient ramené les craintes de récession sur le devant de la scène durant la torpeur estivale, les investisseurs sont largement convaincus que l’économie américaine ne pourra pas connaître autre chose qu’un atterrissage en douceur au cours des prochains trimestres.

Il est vrai que les derniers chiffres révisés du PIB pour le second trimestre 2024 ont de quoi confirmer de telles attentes; en effet, le maintien d’une consommation plus soutenue qu’escompté a permis de démontrer que les craintes d’effondrement consécutif à un détérioration du marché de l’emploi n’étaient pas justifiées.

Le pan de la croissance du «soft landing» est aussi moins à risque, parce que les défenseurs du « monde parfait » pour l’économie ont pu trouver du réconfort dans l’évolution de l’inflation au cours de la saison estivale.

La reprise de contrôle par la Réserve Fédérale de l’envolée des prix post covid ne semble pas se démentir, à l’image des chiffres du l’indice PCE publiés vendredi dernier. C’est d’ailleurs ce que J. Powell a très bien su mettre en exergue lors de la conférence de Jackson Hole, annonçant «à la face du monde» que le pivot de l’autorité monétaire américaine était planifié pour le mois de septembre, en raison d’une plus grande confiance sur le front de l’inflation.

Par essence, un «soft landing» implique que le ralentissement de la conjoncture US sera temporaire et suivi d’une reprise de la croissance non-inflationniste dans l’avenir. A cet égard, la question de savoir à quel horizon celle-ci est en mesure de se matérialiser ne semble pas vraiment être au cœur des interrogations des investisseurs. Est-ce vraiment logique?

Il est vrai que la réalisation de cette espérance dépend de nombreux éléments qui demeurent bien incertains, à commencer par celui que représente la vigueur du cycle de relâchement monétaire sur lequel les grands argentiers d’outre-Atlantique semblent vouloir s’engager.

J. Powell et ses collègues ont cherché à ne pas alimenter des attentes de baisse de taux trop importantes en réaffirmant le caractère «dépendant des données» de leur action à venir. On peut d’ailleurs légitimement se demander si les opérateurs de marché ne se sont pas (une nouvelle fois) emballé dans leurs attentes de recul du loyer de l’argent au cours des dernières semaines. Pour notre part, nous préférons la prudence sur ce front et nous ne pensons pas qu’il est fondé de miser sur plus de 75pb de repli des taux courts d’ici fin 2024.

L’agenda politique du pays de l’Oncle Sam n’est pas moins incertain. Qui gagnera l’élection présidentielle? Quelle majorité au Congrès? Autant de questions auxquelles il est bien difficile de donner une réponse depuis le «drame» de l’éviction de Joe Biden de la course à la Maison Blanche. Les programmes économiques des candidats apparaissent au fil des semaines et le moins que l’on puisse dire est qu’ils ne rassurent pas vraiment les partisans d’un retour à une certaine orthodoxie fiscale, dans un pays dont les perspectives sur les finances publiques ont de quoi faire froid dans le dos, avant même l’application (éventuelle) des mesures préconisées.

De quoi rendre encore moins aisé le «fine tuning» de la Réserve fédérale dans l’atteinte du Graal que représente l’atterrissage en douceur de l’économie. En effet, quel impact stimulant l’agenda politique qui sera mis en œuvre à partir de janvier 2025 pourra avoir ne sera pas sans conséquence sur la vitesse à laquelle l’économie américaine pourrait connaître une reprise conjoncturelle. Ce qui jouera nécessairement un rôle sur l’ampleur du risque monétaire que la Fed sera prête assumer. Au demeurant ce dernier dépendra aussi – pour ne pas dire surtout – de l’impact inflationniste que les plans économiques des candidats en présence pourraient avoir.

Peut-on croire que les mesures protectionnistes de D. Trump pourraient contenir l’inflation, comme il tend à l’affirmer? J’en doute. Le retour au contrôle des prix que K. Harris a tenté de mettre en avant a rapidement nourri des craintes de retour aux années Nixon et aux effets pervers des mesures adoptées dans ce sens à l’époque!

On pourrait ajouter que les évolutions de l’économie chinoise en berne de reprise ou de celle d’une Europe qui peine à se redresser ne sont pas vraiment des sources de certitudes à même de pouvoir imaginer un scénario de reprise de la conjoncture américaine.

En conclusion, il est rassurant de penser que les derniers mois ont permis de rassurer les partisans de l’atterrissage en douceur sur la capacité de ce scénario à devenir une réalité. Ce qui ne veut certainement pas dire que la certitude est définitivement acquise pour autant. Le risque de déception ne doit pas être écarté du revers de la main. De plus, il ne faut pas occulter le fait que si la première phase d’un tel scénario est en voie de se réaliser, la visibilité sur l’horizon temps qui devrait permettre à la seconde, celle de la reprise conjoncturelle, est pour l’instant extrêmement faible. N’en déplaise au comportement des marchés financiers après les secousses de fin-juillet et début août.

Alors que nous entrons dans le dernier tiers de l’année, il y a fort à parier que les interrogations sur la relevance des idées qui sous-tendent le scénario d’atterrissage en douceur ne vont pas disparaître! Il ne faut certainement pas considérer qu’il s’agit d’une «affaire classée». On pourrait même défendre l’idée que le plus facile a été réalisé; en effet, donner des perspectives moins incertaines sur le rebond du cycle qui devrait suivre reste un défi majeur pour les marchés financiers. Ne dit-on pas que ces derniers sont une magnifique machine d’anticipations? Dès lors, il n’est pas déraisonnable de penser que la volatilité sur les actifs financiers pourrait se maintenir au cours des prochains, le temps d’y voir plus clair. 

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