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A l’approche de 2025, les questions sur l’inflation demeurent totalement légitimes

Allnews Francois Savary et Cédric Mondada lancent Genvil Wealth Management & Consulting SA
François Savary, GENVIL SA

Le contexte doit inciter à ne pas prendre des positions trop tranchées sur les taux d’intérêt et les marchés obligataires.

Allnews I 29 I François Savary, GENVIL SA

L’année 2024 restera sous le signe d’une confirmation de la désinflation dans les pays développés, malgré des mouvements parfois «erratiques» qui ont pu susciter des interrogations au sein de la communauté financière à certains moments. Cette tendance désinflationniste a été essentielle pour permettre la mise en œuvre d’un processus de relâchement monétaire par les principales banques centrales (BNS, ECB, Fed); un processus qui devrait  a priori se poursuivre en 2025, même si les opérateurs sont désormais moins sûrs de l’ampleur que ce dernier pourrait prendre.

Ce développement sur les politiques monétaires a évidemment joué un rôle non négligeable dans le comportement des marchés, particulièrement pour les actifs risqués. Les actions américaines sont les grandes gagnantes, dans le sillage d’un atterrissage en douceur que la maîtrise des prix a rendu possible, alors que les valeurs européennes ont pâti d’une croissance atone malgré un reflux plus marqué de l’inflation qu’au pays de l’oncle Sam. De plus, le bon comportement du crédit, les dettes à haut rendement en particulier, résulte également de ce repli de l’inflation à l’échelle internationale.

Alors que la trêve des confiseurs approche et que les américains savourent un repas de Thanksgiving dont la cherté est plus contenue qu’au cours des dernières années, chacun peut se réjouir de voir l’inflation retrouver des niveaux plus raisonnables. Est-ce à dire que nous pouvons mettre (définitivement) derrière nous la douloureuse expérience de la perte de contrôle sur la progression des prix qui nous a tous affecté depuis la COVID-19?

Les opinions à ce sujet demeurent partagées. La réélection de Donald Trump a contribué a alimenter les débats entre les partisans du maintien de la désinflation en 2025 et les défenseurs d’un probable rebond de l’inflation, dans le sillage de mesures de relance (baisse des impôts) et/ou d’une nouvelle salve de tarifs que le président élu pourrait (devrait?) mettre en œuvre.

A cet égard, le marché obligataire des dettes souveraines ne s’y est pas trompé, lui qui a connu une tension significative des rendements en quelques semaines avant de se calmer récemment, démontrant par la-même que les opinions sur l’avenir de l’inflation ne sont pas figées mais aussi – pour ne pas dire surtout – que les incertitudes y relatives demeurent peut-être plus importantes que ce qui serait souhaitable.

Une fois encore la possibilité d’une évolution défavorable de l’inflation en 2025 concerne avant tout les Etats-Unis, en raison des mesures susmentionnées (baisse d’impôts et tarifs) dont il est difficile d’apprécier les effets. La mise en œuvre des mesures commerciales, et surtout leur ampleur, ne sont pas encore définitivement établies. A contrario, la volonté de dérégulation affichée par la nouvelle administration pourrait avoir une incidence favorable sur le comportement de l’inflation de nature à compenser, au moins partiellement, les effets de relance fiscale qui se dessinent. Dans quel ordre de priorité la nouvelle administration Trump entend-elle procéder à l’implantation des grands axes (annoncés) de sa politique? La question n’est pas anodine lorsque l’on tente de réfléchir sur les possibles développements inflationnistes aux Etats-Unis.

En ce qui concerne l’Europe, la tendance désinflationniste qui s’est affirmée au cours des douze derniers mois semble mieux établie et en mesure de se maintenir en 2025, avant tout en raison du contexte de croissance sous-optimale qui perdurera sur le Vieux Continent. De plus, le nombre important de suppressions de postes de travail qui se dessine, tant en France qu’en Allemagne, devrait permettre de modérer la progression (excessive) des salaires dont certains continuent à s’inquiéter.

Au demeurant, les déclarations récentes de Madame Schnabel, membre du Conseil de la BCE, sont venues rappeler que la vigilance «anti-inflationniste» reste bien vivace au sein de l’autorité monétaire! Au risque de précipiter une nouvelle fois l’économie européenne dans les affres de la menace déflationniste alors que la marge de manœuvre budgétaire est réduite? La question mérite d’être posée lorsque l’on voit la situation française et alors qu’une refonte éventuelle du frein à l’endettement allemand est tributaire du résultat des élections de février.

Parler de déflation nous conduit évidemment à considérer la cas chinois, où les chiffres sur l’évolution des prix sont loin de démontrer que l’Empire du Milieu affiche des signaux clairs que le retour à un climat de plus grande stabilité des prix est en ligne de mire. Tout cela pour dire que la Chine n’a pas achevé son combat contre les pressions déflationnistes, d’autant plus que les perspectives de nouvelles tensions dans les relations commerciales internationales pourraient encore compliquer la tâche de Pékin.

Au regard de ce qui précède, il est bien difficile de se faire une idée définitive sur les développements inflationnistes en 2025. C’est d’autant plus vrai que les incertitudes géopolitiques et les perspectives d’un monde de tensions exacerbées sur le front commercial rajoutent au manque de visibilité sur ce front, au même titre que des développements conjoncturels sans grande homogénéité entre les grandes régions du globe.

Ce contexte doit inciter, selon nous, à ne pas prendre des positions trop tranchées sur les taux d’intérêt et les marchés obligataires. Faire preuve d’une certaine prudence sur le front de la duration est donc justifié tant que la visibilité sur le risque inflationniste ne sera pas plus grande. Ce choix est d’autant plus vrai si l’on possède déjà une bonne exposition aux actifs risqués.

Les organismes économiques internationaux n’ont pas de cesse, depuis plusieurs années déjà, de mettre en avant le besoin de mesures pour consolider l’évolution «inquiétante» de l’endettement américain.

Ainsi la question de l’avenir des finances publiques finit par être le parent pauvre de la course à la Maison Blanche. Les propos récents de E. Musk sur sa capacité à trouver quelques trillions de dollars dans le budget, qui peuvent susciter des doutes aussi légitimes que ceux de Trump sur le caractère non inflationnistes des tarifs, ne changent rien à l’affaire!

Pourtant les organismes économiques internationaux n’ont pas de cesse, depuis plusieurs années déjà, de mettre en avant le besoin de mesures pour consolider l’évolution «inquiétante» de l’endettement américain. Ni Kamela Harris ni Donald Trump ne semblent réceptifs aux arguments du FMI. En revanche, indépendamment de qui s’installera dans le bureau ovale en janvier 2025, certaines réalités seront incontournables; le ratio de la dette/PIB des USA va tendre vers les 130% au cours des prochaines années, la charge des intérêts ne va cesser de croître à moyen terme et Washington ne sera pas à l’abri de la question de «mur de refinancement» mondial qui pointe à l’horizon fin 2025 et pour 2026. 

Le marché obligataire ne s’y trompe pas d’ailleurs, lui qui a connu une tension significative sur les rendements depuis quelques semaines. Le retour du taux à dix ans des dettes gouvernementales américaines à 4,30% s’explique pour partie par les bons chiffres de croissance outre-Atlantique mais il doit aussi être vu comme le retour des «bond vigilante» sur le marché; en d’autres termes, ceux qui s’inquiètent de la détérioration des finances publiques se rappellent au bon souvenir des candidats dans cette période pré-électorale. 

L’objectif des 4,50% est tellement proche qu’il est fort probable que l’on aille le tester. Au-delà, un rendement à 10 ans de 5% n’est désormais plus totalement irréaliste pour les prochains mois, ce qui marquerait une tension marquée par rapport aux niveaux observés il y a quelques mois seulement. 

On ne peut que regretter que l’élection présidentielle n’ait pas conduit à engager le débat essentiel de l’endettement public et de sa gestion à moyen terme. L’absence de proposition sur le sujet, voire des propos lénifiants et peu réalistes, apparaît comme la mise en œuvre de la formule «reculer pour mieux sauter». Occulter un problème ne le fait pas disparaître, le futur Président pourrait l’apprendre à ses dépens au cours des prochaines années. Le marché obligataire est déjà là pour appeler à la raison et tout laisse à penser que sa vigilance restera de mise. Une autre manière de dire que des rendements à dix ans à 4,50% ne sont peut-être pas une évidente opportunité d’achat. 

GENVIL Wealth management & Consulting S.A
Rue Claudine-Levet 7
1201 Genève

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